Emmanuel Macron a bouclé sous les applaudissements son grand débat avec des maires corses jeudi, mais déclenché la colère des nationalistes en leur reprochant de ne pas exprimer de "regrets" au sujet de l'assassinat du préfet Erignac en 1998. Le débat, organisé avec les 160 maires ayant répondu présent sur les 360 de l'île, s'annonçait comme le plus délicat de son périple lancé à la mi-janvier pour répondre à la crise des "gilets jaunes".
Si le chef de l'Etat a séduit son auditoire, restreint, dans le village montagnard de Cozzano, à une heure de route d'Ajaccio, il a provoqué la fureur à distance des dirigeants nationalistes au pouvoir qui avaient boycotté la réunion. Après un premier tacle, sur les Corses qui "méritent mieux que des guerres de tranchées", Emmanuel Macron s'est ensuite voulu conciliant en déclarant que "la fierté des Corses (l)e rend fier aussi", reconnaissant qu'"à chaque fois qu'on a voulu nier sa singularité", la violence a repris.
Mais à une question du maire LREM de Bonifacio Jean-Charles Orsucci lui demandant de "trouver les mots de paix", il est repassé à l'offensive, retrouvant les critiques de sa visite de l'an dernier. "Ceux qui veulent aujourd'hui défendre l'identité corse doivent faire ce travail mémoriel" et exprimer des "regrets" sur l'assassinat du préfet Claude Erignac" le 6 février 1998, a-t-il lancé. "Rien ne pourra avancer si on ne condamne pas aussi les crimes qui ont été commis (...) Tant que certains n'auront pas le courage de dire: "C'est une plaie, notre cicatrice et la souffrance de la famille Erignac est aussi la nôtre", ils feront bégayer l'Histoire", a-t-il ajouté.
Les maires sur place ont applaudi. Mais à distance, cette sortie a ulcéré le président autonomiste du conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni et le président indépendantiste de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni. "Je crains que ce soit cet argument, jusqu'à présent jamais formulé, qui soit le véritable argument qui empêche de renouer le dialogue et si c'est le cas, c'est à la fois politiquement indéfendable et profondément injuste parce que ça consiste à faire peser une responsabilité collective sur les nationalistes voire sur les Corses qui se transmettrait de décennie en décennie voire de génération en génération", a déploré M. Simeoni auprès de l'AFP, estimant que le travail mémoriel sur "le dramatique assassinat" du préfet Erignac avait "été fait".
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