Une fin de session parlementaire aux allures de sprint final. Ce mardi après-midi, deux textes de loi qui ont chacun fait couler beaucoup d’encre étaient débattus au Parlement. Le premier, proposé par le sénateur Laurent Duplomb, vise à « lever les contraintes » des agriculteurs. Il a été adopté dans sa version définitive à l’Assemblée nationale en fin d’après-midi, par 316 voix contre 223. Le second, initiative du sénateur Daniel Gremillet, porte sur la programmation nationale et la simplification normative dans le secteur économique de l’énergie. Il devait normalement être adopté en seconde lecture au Sénat dans la nuit. Les deux propositions de loi, à forts enjeux, avaient connu un parcours pour le moins mouvementé au Parlement ces dernières semaines.
La loi Duplomb, très décriée par ses détracteurs pour ses « reculs environnementaux », ouvre notamment la voie à la réintroduction dérogatoire de plusieurs insecticides pourtant interdits depuis quelques années, comme l’acétamipride, un produit de la famille des néonicotinoïdes. Le texte révise également le fonctionnement de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) sur l’évaluation des produits phytosanitaires. Un scénario improbable avait eu lieu lors de sa première lecture au Palais Bourbon : la loi avait subi une tentative de blocage par la gauche, qui avait déposé des centaines d’amendements, ce qui avait poussé le rapporteur LR, Julien Dive, à riposter en faisant adopter une motion de rejet sur son propre texte, afin d’accélérer la navette parlementaire.
Sans surprise, Rachida Dati a employé les grands moyens. Alors que depuis jeudi, la gauche s’évertuait à trouver toutes les astuces possibles et imaginables pour obstruer les débats sur la proposition de loi concernant l’audiovisuel public, la ministre de la Culture a décidé, ce vendredi matin, à la surprise générale, de dégainer l’article 44.3 de la Constitution, dit du «vote bloqué». Et de demander ainsi que les sénateurs se prononcent par un vote unique sur l’ensemble du texte, mettant ainsi fin aux très longues prises de parole des socialistes, écologistes et communistes, qui monopolisaient la parole afin de gagner du temps, depuis le début des débats. Une disposition constitutionnelle qui n’avait pas été utilisée au Palais du Luxembourg depuis 2023 et la réforme des retraites, lorsque la gauche avait, pendant des jours, tenu le micro pour retarder l’échéance, et que le gouvernement avait donc fini par en faire usage.
«C’est du jamais vu ! Qu’une ministre fasse ça sur une simple proposition de loi sénatoriale, alors qu’il n’y a que 350 amendements à examiner... C’est l’acte vengeur d’une Rachida Dati vexée. Je n’ai jamais vu ça. Sa conception de la démocratie est détestable», peste, auprès du Figaro, le patron des sénateurs socialistes, Patrick Kanner. Les multiples rappels au règlement de la gauche tout au long de la matinée n’auront rien changé. Ce vendredi après-midi, les sénateurs ont donc adopté en seconde lecture, à 194 voix pour, 113 contre, cette réforme, qui prévoit de créer un « holding » réunissant Radio France, France Télévisons et l’INA.
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