"Nous sommes prêts à aller jusqu'à l'autonomie. Voilà, le mot est dit." Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a fait un premier pas vers les élus de Corse en ouvrant la voie à une autonomie de l'île, dans un entretien à Corse-Matin, mercredi 16 mars. En visite sur l'île, il a promis de s'entretenir de "la question institutionnelle en premier lieu" à condition d'un "retour au calme". Depuis 10 jours, en effet, manifestations et violences se sont multipliées après l'agression d'Yvan Colonna, le 2 mars, à la prison d'Arles. Le militant indépendantiste corse, condamné pour l'assassinat du préfet Erignac en 1998, se trouve toujours dans le coma. Franceinfo fait le point sur cette annonce dans une île où "les voix se réclamant du nationalisme corse ou de l'autonomisme" ont cumulé "près de 70% des suffrages lors des dernières élections régionales en juin dernier".
"La question est de savoir ce qu'est cette autonomie. Il faut qu'on en discute. Et cela prend du temps, car il s'agit de l'avenir des Corses", a fait savoir le ministre de l'Intérieur. A l'issue d'un Conseil des ministres, mercredi, Gérald Darmanin a précisé que "l'autonomie" envisagée ne peut être accordée qu'au terme d'un "long processus", "dans les mois ou les années qui viennent". Cette annonce a un air de déjà-vu. Peu avant la dernière élection présidentielle, en avril 2017, le candidat Emmanuel Macron estimait pouvoir "envisager d'aller plus loin et de réviser la Constitution" si "le cadre actuel ne permet pas à la Corse de développer ses potentialités". Les espoirs des élus nationalistes avaient vite été calmés : lors d'un discours en février 2018, le président avait balayé la plupart de leurs revendications. Seule la mention de la Corse dans la Constitution avait été évoquée de nouveau, sans être concrétisée depuis.
"Ce sont des mots importants, qui ouvrent une perspective, mais des mots auxquels il convient maintenant de donner des prolongements et des concrétisations", a réagi le président autonomiste du conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, après l'interview de Gérald Darmanin. A moins d'un mois de la présidentielle, les négociations entamées sont donc conditionnées à la réélection d'Emmanuel Macron. A la question "pourquoi maintenant ?" posée par Corse-Matin, le ministre a évoqué "la gravité des événements".
La collectivité unique de Corse est "unique sur le territoire". Elle résulte de la fusion entre l'ancienne collectivité territoriale de Corse et des deux conseils départementaux, explique André Fazi, spécialiste du nationalisme corse et maître de conférences en science politique à l'université de Corse. Contrairement aux autres régions françaises, en Corse, "la séparation est nette entre l'organe délibératif et l'organe exécutif".
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