Le timing d’intervention du Président algérien Tebboune et de l’ancien Premier ministre français, Dominique de Villlepin, dans les médias français et algérien dénote d’une volonté manifeste des deux côtés de la Méditerranée de maintenir des liens entre la France et l’Algérie au-delà de l’actuelle crise. Sur fond d’une négociation discrète entre les deux Présidences française et algérienne pour la libération de l’écrivain Bouallem Sansal dont témoignent les déplacements à Alger, ces dernières semaines, de la conseillère Maghreb d’Emmanuel Macron et du patron des services extérieurs français.
Hélas, le microcosme parisien, qui croit bien faire d’entretenir un brouhaha hostile à la nation algérienne et qui pense favoriser ainsi la libération de l’écrivain, met du feu sur les braises franco-algériennes. En écho, des voix algériennes jouent de l’appartenance de l’écrivain au comité éditorial de la revue d’extrême-droite « Frontières » pour alimenter la détestation d’une partie de l’opinion algérienne envers la France et rendre impossible tout apaisement entre Paris et Alger.
Depuis la fin du mois de juillet passé, les relations entre les deux pays ont atteint un niveau de crise jamais égalé mais pas encore au bord de la rupture. La reconnaissance de la marocanité du Sahara occidentale par le Président français cet été est la principale cause de la discorde actuelle qui a provoqué le rappel de l’ambassadeur d’Algérie de Paris. La détérioration des relations entre les deux pays s’est accompagnée des joutes verbales provocatrices des personnels politiques dans les médias français et algérien.
Le 9 février, l’ancien premier ministre français et ancien secrétaire général à l’Élysée du président Chirac, Dominique de Villepin, était l’invité de la chaîne internationale algérienne (AL24), dépendant de la présidence, en s’adressant à l’opinion publique algérienne et à la diaspora algérienne à l’étranger, n’avait de visée que renouer le dialogue avec un pays central au Maghreb et important sur l’échiquier africain.
Ces tirs croisés médiatiques soulèvent la nécessité du maintien des liens en dépit des désaccords profonds sur des dossiers brûlants entre la France et l’Algérie. Conscient des enjeux géopolitiques régionaux et internationaux et de l’histoire commune aux deux pays, la nécessité de dépasser les obstacles s’impose comme réalité avérée. Le silence du président français est complice, du fait qu’il est condamné à garder le silence compte tenu de la fragilité de son gouvernement constamment menacé par le glaive de la motion de censure de l’extrême-droite au Parlement.
En écho à la métaphore du président Tebboune évoquant « le poil de Mu’awiya », l’ancien Premier ministre français, Dominique de Villepin, plaide pour que « les fils se tissent à nouveau ». La comparaison fait raison dans ce jeu de langage qui est similaire dans sa forme expressive mais subtil et avisé dans son fond de pensée. L’ancien ministre des affaires étrangères a fait une démonstration de son style diplomatique habituel. « La responsabilité, qui est la nôtre, chacun à notre place, c’est de faire en sorte que les fils puissent se tisser à nouveau, Je n’ignore pas les difficultés, les obstacles. Mais ce que je sais, c’est que notre volonté doit être très forte. » .
Dans son interview à AL24, l’ancien Premier ministre français met l’accent sur la nécessité du dialogue en se basant sur le partage du socle commun « la langue, l’histoire y compris l’histoire tragique, j’ai grandi avec le poids de cette histoire ». Sans renier le passé colonial, Dominique de Villepin voit aussi d’autres horizons d’opportunités, citant « le partenariat entre la France et l’Algérie, des défis formidables, l’Algérie a des capacités, des richesses, La France a des atouts qui, mis ensemble, peuvent constituer des chances de croissance, d’ouverture au monde, des chances pour la stabilité, à la fois de l’Afrique mais aussi des régions du monde. »
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